Mon interview dans Sexualités humaines-3
Troisième question de mon interview par la revue Sexualités Humaines :
Dans ton ouvrage, tu critiques sans concession la philosophie du mouvement LGBT. Pourquoi une telle sévérité ? En quoi serait-elle potentiellement dangereuse à l’endroit des homosexuels ?
Gaëtan Poisson : A l’origine, certains combats menés par le mouvement LGBT ont été justes, c’est ma conviction : la déstigmatisation des personnes homosexuelles et la lutte contre le sida notamment. Cependant, une grave dérive est constatable depuis des années : sans utiliser le concept facile de « dictature des minorités », je dirais que l’œil de Moscou a changé de camp. Le politiquement correct est désormais clairement du côté LGBT, jusque dans la grammaire, à tel point que certains lettrés homosexuels se retrouvent soupçonnés de trahison lorsqu’ils plaident pour l’orthographe académique. Si cela ne manifeste pas une dérive inquiétante, allons donc pique-niquer sur le Vésuve ! Plus sérieusement, l’usage totalitaire du mot « tolérance » est une contradiction dans les termes qui devrait sauter aux yeux, mais le mouvement LGBT n’en a cure. Il en impose l’usage jusqu’à l’absurde, et menace de chasse aux sorcières ceux qui seraient perplexes : il existe désormais des « sensitivity readers » qui expurgent des manuscrits les termes jugés offensants pour les minorités raciales ou sexuelles. Le citoyen est-il prêt à se faire dicter ce qu’il doit penser ? Le mouvement LGBT menace désormais jusqu’au sommet des universités où certains sociologues se retrouvent blacklistés pour des raisons scandaleuses. Nous ne pouvons accepter ces pratiques, ces agissements qui font de nécessité vertu. Non. Le cadre démocratique prescrit bien autre chose pour l’espace public. Il y a des règles, et on ne saurait intimider autrui au nom de la tolérance. Ce que finira par démontrer le mouvement LGBT, s’il poursuit ses menées sur cette voie agressive, c’est que la haine se marie bien avec le rose. Les personnes homosexuelles doivent être défendues, protégées, entendues, mais jamais réduites à leur sexualité. Or, le combat LGBT fait promotion flagrante de types de sexualités – y compris brutales – qui peuvent concourir à dégrader la personne humaine : voir des hommes marcher à quatre pattes et tenus en laisse dans les défilés de la Gay Pride, cela ne me fait pas rire. Cela me suffit pour dire qu’il y a problème. Les nouvelles acceptions de la famille, très encouragées par le mouvement LGBT, finissent par distendre le mot à tel point que le retour d’élastique fera des ravages. Toutes proportions gardées, on peut ici faire un parallèle avec l’extension du mot culture. De nos jours, celle-ci est en ruine… ou très florissante, selon les critères que vous y incluez : jeu vidéo, skateboard, etc… Ce que je reproche le plus au mouvement LGBT, c’est la confusion gravissime entre « Droit » et « droit à ». On ne se comporte pas en client devant Marianne, mais en citoyen.
Enfin, je distingue nettement le mouvement LGBT des personnes qui le constituent, et qui sont individuellement estimables.
Gaëtan Poisson 